Catégories

Traitements innovants en toxicomanie

Janvier 2025


This file is licensed under the Creative Commons Attribution 4.0 International license. Retrieved from Wikimedia commons on December 14th 2024. Original source : Our World in Data 2022-11-30, https://owidm.wmcloud.org/grapher/dalys-rates-from-adhd.

TDAH, amphétamines et troubles lié à l’utilisation de substance – histoire, épidémiologie et implications pour la santé mondiale des populations

Le trouble du déficit de l’attention et d’hyperactivité (TDAH) est l’un des troubles neurodéveloppementaux les plus diagnostiqués dans le monde (1). Le TDAH se manifeste par une inattention persistante, une désinhibition des comportements verbomoteurs et par l’impulsivité. Sans intervention adaptée, cette condition peut impacter le fonctionnement de ces personnes sur les plans social, personnel et professionnel (3-5). Aux États-Unis, on estime qu’environ 7.1 millions de jeunes âgés entre 3 et 17 ans avait reçu ce diagnostic en 2022 (2) alors que 15.5 millions adultes avaient reçu ce diagnostic en 2023 (5). On estime une prévalence mondiale entre 8-10% chez les jeunes et 2.5-6% chez les adultes (5-10).

Les traitements par les amphétamines et méthamphétamines sont reconnus comme l’une des méthodes les plus efficaces pour minimiser les symptômes de cette condition. Depuis leur introduction, la prescription de ces stimulants pour le TDAH ne cesse d’augmenter à travers le monde (11). La prescription de stimulants pour le TDAH est controversée, notamment à cause de ces effets néfastes potentiels, l’absence de réel bénéfice à long-terme et des enjeux éthiques entourant l’amélioration cognitive (12-13). En effet, ces agents pharmacologiques peuvent conduire au développement d’une dépendance lorsqu’utilisés de façon contre-indiquée (14). Cependant, la prévalence actuelle du TDAH chez les individus vivant avec un trouble d’usage d’amphétamine (ATSUD) est peu documentée (15-16).

Dans le cadre d’un nouveau projet intitulé COMPASS, notre équipe évaluera la prévalence mondiale du TDAH chez les adultes vivant avec un ATSUD en réalisant une revue systématique et une méta-analyse des proportions de TDAH concomitant au ATSUD rapportées dans la littérature scientifique à travers le monde et le temps.

Article par Anne-Marie Bissonnette

Références

  1. Francés L, Quintero J, Fernández A, Ruiz A, Caules J, Fillon G, et al. Current state of knowledge on the prevalence of neurodevelopmental disorders in childhood according to the DSM-5: a systematic review in accordance with the PRISMA criteria. Child Adolesc Psychiatry Ment Health. 2022;16(1):27.
  2. Danielson ML, Claussen AH, Bitsko RH, Katz SM, Newsome K, Blumberg SJ, et al. ADHD Prevalence Among U.S. Children and Adolescents in 2022: Diagnosis, Severity, Co-Occurring Disorders, and Treatment. Journal of Clinical Child & Adolescent Psychology. 2024;53(3):343-60.
  3. Diagnostic and statistical manual of mental disorders (5th ed., text rev.). 2022.
  4. Lauder K, McDowall A, Tenenbaum HR. A systematic review of interventions to support adults with ADHD at work—Implications from the paucity of context-specific research for theory and practice. Frontiers in psychology. 2022;13:893469.
  5. Staley BS. Attention-Deficit/Hyperactivity Disorder Diagnosis, Treatment, and Telehealth Use in Adults—National Center for Health Statistics Rapid Surveys System, United States, October–November 2023. MMWR Morbidity and Mortality Weekly Report. 2024;73.
  6. Ayano G, Demelash S, Gizachew Y, Tsegay L, Alati R. The global prevalence of attention deficit hyperactivity disorder in children and adolescents: An umbrella review of meta-analyses. Journal of Affective Disorders. 2023;339:860-6.
  7. Ayano G, Tsegay L, Gizachew Y, Necho M, Yohannes K, Abraha M, et al. Prevalence of attention deficit hyperactivity disorder in adults: Umbrella review of evidence generated across the globe. Psychiatry Research. 2023;328:115449.
  8. Song P, Zha M, Yang Q, Zhang Y, Li X, Rudan I. The prevalence of adult attention-deficit hyperactivity disorder: A global systematic review and meta-analysis. J Glob Health. 2021;11:04009.
  9. Zablotsky B, Black LI, Maenner MJ, Schieve LA, Danielson ML, Bitsko RH, et al. Prevalence and Trends of Developmental Disabilities among Children in the United States: 2009-2017. Pediatrics. 2019;144(4).
  10. Collaborators GMD. Global, regional, and national burden of 12 mental disorders in 204 countries and territories, 1990–2019: a systematic analysis for the Global Burden of Disease Study 2019. The Lancet Psychiatry. 2022;9(2):137-50.
  11. Chan AY, Ma T-T, Lau WC, Ip P, Coghill D, Gao L, et al. Attention-deficit/hyperactivity disorder medication consumption in 64 countries and regions from 2015 to 2019: a longitudinal study. EClinicalMedicine. 2023;58.
  12. Gonon F. The dopaminergic hypothesis of attention-deficit/hyperactivity disorder needs re-examining. Trends in Neurosciences. 2009;32(1):2-8.
  13. Safer DJ. Are stimulants overprescribed for youths with ADHD? Ann Clin Psychiatry. 2000;12(1):55-62.
  14. Belfiore CI, Galofaro V, Cotroneo D, Lopis A, Tringali I, Denaro V, Casu M. A Multi-Level Analysis of Biological, Social, and Psychological Determinants of Substance Use Disorder and Co-Occurring Mental Health Outcomes. Psychoactives. 2024;3(2):194-214.
  15. van Emmerik-van Oortmerssen K, van de Glind G, van den Brink W, Smit F, Crunelle CL, Swets M, Schoevers RA. Prevalence of attention-deficit hyperactivity disorder in substance use disorder patients: A meta-analysis and meta-regression analysis. Drug and Alcohol Dependence. 2012;122(1):11-9.
  16. Mikail NOURREDINE, Lucie JUREK, Benjamin ROLLAND. Prevalence of substance use disorder in adult with attention deficit/hyperactivity disorder: A systematic review and meta-analysis. PROSPERO 2024 CRD42024388211 Available from: https://www.crd.york.ac.uk/prospero/display_record.php?ID=CRD42024388211


Catégories

Traitements innovants en toxicomanie

Septembre 2024


À la recherche d’un remède pour les troubles liés à l’utilisation d’amphétamines : sommes-nous proches d’une solution ?

Les troubles liés à l’utilisation d’amphétamines émergent comme un problème de santé publique silencieux, faisant plus de victimes dans les années 2020 que dans toutes les années précédentes combinées, autant au Canada qu’aux États-Unis. Selon les résultats de l’étude Global Burden of Disease (GBD) 2021 (1), les taux de mortalité standardisés par âge ont grimpé en flèche au cours des 20 dernières années (0,15 pour 100 000 en 2000 contre 1,12 pour 100 000 en 2020) dans les pays nord-américains à revenu élevé (Figure). Cette tendance alarmante souligne le besoin urgent de stratégies efficaces de réduction des méfaits et de traitements pharmacologiques pour compléter les interventions psychosociales existantes.

Il n’existe actuellement aucun traitement pharmacologique largement accepté pour les troubles liés à l’utilisation d’amphétamines. Sur des centaines d’essais cliniques au cours des 30 dernières années, certains médicaments, tels que les psychostimulants et le bupropion, ont montré des signaux modestes d’efficacité. Cependant, aucun médicament n’a encore démontré de manière constante une efficacité suffisamment robuste pour être intégré dans les soins apportés aux personnes vivant avec un trouble lié à l’utilisation d’amphétamines.

Une étude récente (ADAPT-2) publiée dans le New England Journal of Medicine en 2021 (2) nous a fourni des preuves concrètes de l’efficacité et de l’innocuité de l’association du bupropion (un antidépresseur stimulant) et de la naltrexone injectable à libération prolongée (un antagoniste des opioïdes) pour le traitement des troubles liés à l’utilisation d’amphétamines. Cette thérapie combinée a donné de l’espoir en montrant qu’elle peut être associée à une diminution à court terme de l’utilisation et de l’envie d’amphétamines. Bien que ces résultats encourageants puissent contribuer à façonner certaines recommandations appuyées par des données probantes, les résultats ne portaient que sur deux phases d’étude de 6 semaines sans fournir de signaux sur l’efficacité à long terme de ce traitement. De plus, l’étude ADAPT-2 n’incluait pas de groupes distincts pour le bupropion et la naltrexone utilisé indépendamment en monothérapie. Il est donc difficile de déterminer la contribution individuelle de chaque médicament aux bénéfices observés. Une méta-analyse de Bakouni et al. (3) a confirmé les résultats de l’étude ADAPT-2, même en incluant les études sur le bupropion seul. Ces données suggèrent que le bupropion peut être efficace dans le traitement des troubles liés à l’utilisation d’amphétamines. Une autre méta-analyse (manuscrit accepté) de Bastien et al. (4) sur l’intervention à la naltrexone seule n’a pas soutenu un régime de naltrexone autonome comme traitement efficace. Alors que les résultats de l’étude ADAPT-2 ont fait évoluer notre compréhension de la prise en charge des troubles liés à l’utilisation d’amphétamines, d’autres essais cliniques de ces molécules sont nécessaires pour aider à l’établissement d’un traitement convaincant fondé sur les preuves.

Les psychostimulants sur ordonnance tels que le méthylphénidate et la dextroampétamine sont un autre groupe de médicaments qui ont été largement étudiés pour le traitement des troubles liés à l’utilisation d’amphétamines. Ces études ont également fini par trouver un effet modeste des psychostimulants sur ordonnance sur les résultats principalement basés sur l’abstinence. Une méta-analyse de Sharafi et al. (5) a souligné l’utilité des psychostimulants sur ordonnance pour réduire l’utilisation et l’envie d’amphétamines. De plus, cette méta-analyse rapporte certaines données suggérant que l’augmentation du dosage des molécules de psychostimulant de prescription ou l’extension de la durée du traitement peuvent améliorer les résultats. Bien que cela semble prometteur, la fiabilité de cette conclusion est limitée par le nombre d’études incluses dans le regroupement des données. La mise en œuvre de psychostimulants sur ordonnance en tant que thérapie agoniste stimulante a été critiquée en raison de leur potentiel d’abus, de leur effet modeste sur les mesures de résultat cibles, de leur sécurité à long terme et de leur rentabilité (5, 6). Actuellement, deux groupes étudient l’efficacité et l’innocuité de la lisdexamphétamine à haute dose, une prodrogue de la dextroampétamine qui offre une durée d’action plus longue et un risque d’abus plus faible. Les études LiMA (7) et ASCME (8) peuvent contribuer à la proposition d’un cadre thérapeutique agoniste stimulant à haute dose. Les résultats de ces études sont très attendus par la communauté scientifique et médicale, étant donné leur potentiel à transformer les interventions dispensées à cette population.

Récemment, l’American Society of Addiction Medicine (ASAM) et l’American Academy of Addiction Psychiatry (AAAP) ont recommandé des interventions pharmacologiques pour la prise en charge des troubles liés à l’utilisation d’amphétamines dans leurs lignes directrices de pratique clinique fondées sur les preuves pour la prise en charge des troubles liés à l’utilisation de stimulants (9). Les recommandations pour la prescription de bupropion, bupropion/naltrexone, topiramate, mirtazapine et méthylphénidate sont assorties d’un degré de certitude moyen à faible et d’une force conditionnelle. Cela signifie que nous avons besoin de plus d’essais cliniques de haute qualité et de stratégies de synthèse des connaissances telles que les méta-analyses. À cet égard, une méta-analyse en réseau portant sur l’effet des interventions pharmacologiques, psychosociales et de réduction des méfaits pour le traitement des troubles liés à l’utilisation d’amphétamines vient d’être publiée (10). Les signaux d’efficacité ont été principalement observés en faveur des formulations avec une seule étude comme la quétiapine et le riluzole plutôt que pour les médicaments étudiés fréquemment comme la bupropion, le modafinil et la naltrexone. Ces résultats peuvent impliquer de nouveaux candidats pharmacologiques permettant de réaliser davantage d’essais cliniques afin de reproduire les résultats dans des populations d’étude importantes et diversifiées. D’autres méta-analyses en réseau similaires sont en cours, notamment une sur les interventions pharmacologiques (CRD42023473768) et une autre sur les interventions psychosociales (CRD42023450375). Les résultats de ces études secondaires peuvent contribuer à nos connaissances et à notre compréhension des modalités disponibles pour le traitement des troubles liés à l’utilisation d’amphétamines et mieux informer à la fois les équipes de recherches et les équipes médicales.

Certaines des stratégies qui peuvent être utilisées pour intervenir auprès des personnes vivant avec des troubles liés à l’utilisation d’amphétamines comprennent notamment la prise en charge des troubles concomitants tels que la psychose et la dépression. À cette fin, le Centre d’Expertise et de Collaboration en Troubles Concomitants (CECTC) a récemment publié un avis scientifique formulant des conseils sur les bonnes pratiques liées à l’évaluation et à la prise en charge des personnes vivant avec psychose et un trouble d’utilisation de stimulants en salle d’urgence (accessible ici). Cette initiative, ainsi que bien d’autres de la part du milieu universitaire et de la communauté médicale, montre comment le domaine évolue vers le développement d’options de traitement innovantes, contemporaines et efficaces aux personnes vivant avec un trouble lié à l’utilisation d’amphétamines. Avec un regain d’effort de recherche, des modalités de traitement robustes appuyées par des données probantes et adaptées à cette population spécifique devraient voir le jour sous peu !

Article par Heidar Sharafi

Références

  1. Global Burden of Disease (GBD) 2021 study [Internet]. 2021 [cited 2024-10-09]. Available from: https://vizhub.healthdata.org/gbd-results/.

  2. Trivedi MH, Walker R, Ling W, Cruz Ad, Sharma G, Carmody T, et al. Bupropion and Naltrexone in Methamphetamine Use Disorder. New England Journal of Medicine. 2021;384(2):140-53.

  3. Bakouni H, Sharafi H, Bahremand A, Drouin S, Ziegler D, Bach P, et al. Bupropion for treatment of amphetamine-type stimulant use disorder: A systematic review and meta-analysis of placebo-controlled randomized clinical trials. Drug Alcohol Depend. 2023;253:111018.

  4. Bastien G, McAnulty C, Sharafi H, Amani M, Elkrief L, Ziegler D, et al. Is naltrexone effective and safe for treating amphetamine-type stimulant use disorder? A systematic review and meta-analysis. Journal of Addiction Medicine. 2024; Accepted manuscript.

  5. Sharafi H, Jutras-Aswad D. Response to Hall et al.: Prescription psychostimulants for amphetamine-type stimulant use disorder – acknowledging challenges but not giving up on its potential cost-effectiveness. Addiction. 2024;119(4):788-9.

  6. Hall W, Darke S, Farrell M. Do we need clinical trials of high dose stimulant agonist treatment for stimulant use disorders? Addiction. 2024;119(4):786-7.

  7. Ezard N, Dunlop A, Hall M, Ali R, McKetin R, Bruno R, et al. LiMA: a study protocol for a randomised, double-blind, placebo controlled trial of lisdexamfetamine for the treatment of methamphetamine dependence. BMJ Open. 2018;8(7):e020723.

  8. Clinical Trial of High Dose Lisdexamfetamine and Contingency Management in MA Users [Internet]. National library of medicine. 2024 [cited 2024-10-09]. Available from: https://clinicaltrials.gov/study/NCT05854667.

  9. The ASAM/AAAP Clinical Practice Guideline on the Management of Stimulant Use Disorder. Journal of Addiction Medicine. 2024;18(1S):1-56.

  10. Khalili M, Sadeghirad B, Bach P, Crabtree A, Javadi S, Sadeghi E, et al. Management of Amphetamine and Methamphetamine Use Disorders: A Systematic Review and Network Meta-analysis of Randomized Trials. International Journal of Mental Health and Addiction. 2024.

 


Catégories

Traitements innovants en toxicomanie

Août 2024


Bourse Horizon-Jeunesse : encourager la résilience chez les jeunes face aux troubles concomitants

Si toi ou quelqu’un que tu connais a surmonté des défis liés à la santé mentale et à la dépendance, la bourse Horizon-Jeunesse est là pour reconnaître ton courage et ta résilience, et te donner un petit coup de pouce supplémentaire 🌟.

 

Projet collaboratif du Centre d’expertise et de collaboration en troubles concomitants, cette bourse a été conçue par et pour les jeunes ayant vécu ou vivant avec des troubles concomitants.

 

Les participants éligibles pourraient recevoir 1 000 $ pour les aider à poursuivre ou reprendre leurs études cet automne. Que tu sois inscrit dans un programme d’éducation aux adultes, au cégep, ou à l’université dans un domaine lié aux services sociaux (soins infirmiers, travail social, pair-aidance, intervention, etc.), cette bourse est pour toi!

 

De plus, les candidats peuvent partager leurs expériences de manière unique, que ce soit par un essai traditionnel, un poème, une œuvre d’art, etc. Toute forme de communication est acceptée.

 

Tu peux trouver les critères d’éligibilité détaillés dans le formulaire de candidature

 

Pour toute question, envoie-nous un courriel à bourse.cectc.chum@ssss.gouv.qc.ca

 

La période de candidature se termine le 29 septembre 2024, alors n’attends pas!

 

Article par Christina McAnulty et Maribele Alayo Santa Cruz


Catégories

Traitements innovants en toxicomanie

Juillet 2024


L’utilisation du cannabis non-thérapeutique dans le contexte de l’épilepsie et les répercussions sur la santé

 

L’utilisation de cannabis parmi les personnes épileptiques est un sujet de préoccupation croissante. Environ 50% des personnes atteintes d’épilepsie consomment du cannabis de manière non-thérapeutique et sans la supervision d’un professionnel de santé. La majorité des études scientifiques suggèrent que les effets anti-crises attribués au cannabis sont liés au CBD à des doses très élevées et les preuves solides disponibles à ce jour concernent principalement les populations pédiatriques atteintes de syndromes épileptiques très spécifiques. Bien que certaines données, encore incertaines, suggèrent que le THC pourrait influencer l’intensité et la fréquence des crises chez certaines populations, les données probantes à cet égard restent limitées, la plupart des études ayant été réalisées sur des produits contenant principalement du CBD et très peu de THC. Par ailleurs, certaines études mentionnent que les impacts neurocognitifs négatifs du cannabis sont principalement dus au THC.

Étant donné le nombre important de personnes épileptiques ayant des problèmes de santé cognitive et mentale, ou étant prédisposées à en développer, il s’avère nécessaire d’évaluer la prévalence et les profils d’utilisation de cannabis non-médical, ainsi que son association corrélationnelle sur la santé cognitive et mentale dans le contexte de l’épilepsie. Les résultats de cette recherche auront des retombées significatives pour la gestion clinique des patients et les politiques de santé publique.

En collaboration avec le laboratoire de recherche du Dr Dang Khoa Nguyen, neuro-épileptologue au CHUM, notre équipe de recherche mène une étude visant à fournir des données probantes sur les effets du cannabis consommé avec une visée non-thérapeutique sur la santé mentale et cognitive dans le contexte de l’épilepsie. Cette étude utilise des enquêtes par questionnaires et des évaluations neuropsychologiques. Nos résultats préliminaires montrent que, au cours des 12 derniers mois, 42% des hommes et 19% des femmes ont consommé du cannabis à des fins non-médicales. Parmi eux, 72% ont rapporté consommer du cannabis contenant exclusivement du THC, plus de THC que de CBD, ou autant de THC que de CBD. De plus, les répondants se sentaient peu ou pas informés des bénéfices (72%) et des risques (71%) pour leur santé, soulignant la nécessité de combler les lacunes actuelles entourant la consommation de cannabis non-médical chez les personnes épileptiques. 

Cette étude permettra aux personnes concernées de faire des choix éclairés, en tenant compte des risques et des bénéfices possibles liés à la consommation de cannabis non-médical.

Les avancées de notre recherche seront publiées sur notre site internet, dans la section « Actualité ».

 

Texte par Daphné Citherlet

 

 


Catégories
Traitements innovants en toxicomanie

Juin 2024

https://www.stockvault.net/data/2017/02/21/223812/preview16.jpg

Étude de cohorte TRICCHOME chez les jeunes consommateurs de cannabis

La recherche sur l’utilisation de substances psychoactives, en particulier le cannabis, souligne la nécessité d’une investigation plus approfondie des patrons de consommation. Cette genre d’initiative en recherche permet notamment de stimuler le développement d’interventions de santé publique ciblées mieux informées, tenant compte à la fois des risques et bénéfices potentiels associés à son utilisation, notamment chez les jeunes adultes.

 

L’étude TRICCHOME (TRajectoires Individuelles de Consommation de Cannabis en situation Habituelle et Observations de leurs Modalités en contexte Écologique), qui débutera à l’automne 2024 au laboratoire DJA, vise à combler ce manque de connaissance en fournissant une analyse exhaustive des patrons de consommation de cannabis chez des jeunes adultes âgés de 18 à 24 ans qui en consomment au moins une fois par semaine. En utilisant une approche multifactorielle, comprenant des paramètres tels que la fréquence d’utilisation, les types de produits et les doses de cannabinoïdes, l’étude vise à comprendre plus largement la complexité des patrons d’utilisation non thérapeutique du cannabis. Grâce au suivi longitudinal de la consommation via une application mobile, l’équipe de recherche vise à caractériser la manière dont ces patrons de consommation évoluent dans le temps et leurs impacts potentiels sur les déterminants sociaux et de la santé. Cette recherche est cruciale pour développer des plans de santé publique ciblés adaptés aux besoins spécifiques des jeunes utilisateurs de cannabis, visant finalement à en atténuer les dommages potentiels et à développer un discours de santé publique nuancé qui s’appuie sur des données probantes.

 

Les personnes volontaires participant à l’étude utiliseront l’application mobile novatrice développée par notre équipe pour enregistrer des informations détaillées sur chaque session de consommation de cannabis, y compris la voie d’administration, le type de produit, la fréquence, la durée, la quantité utilisée, l’expérience subjective et le contexte environnemental de consommation. La saisie de données rétrospectives sera autorisée pendant 14 jours, et les résultats liés à la santé seront mesurés tous les quatre mois via l’application, avec des fonctionnalités supplémentaires se débloquant périodiquement pour faciliter la collecte de données.

 

Ce projet permettra, pour la première fois, de mieux comprendre comment les jeunes qui consomment fréquemment ou quotidiennement du cannabis choisissent de consommer différents types de produits et comment ces modes de consommation distincts influencent (positivement ou négativement) leur santé globale.

 

Article par Anita Abboud

Catégories

Traitements innovants en toxicomanie

Mai 2024


Photo de Jbud77 sur seedfinder.eu | CC BY-NC-SA

Projet SPECTRE : nouvelle étude sur l’interaction des effets du CBD et THC vaporisé chez l’humain

Couramment distribués sur les tablettes des succursales de la SQDC, les produits de cannabis composés de concentrations variables de ∆9-tétrahydrocannabinol (THC) et de cannabidiol (CBD) font fureur auprès des personnes qui consomment dans la Belle Province. Selon la plus récente Enquête québécoise sur le cannabis 2022 (2023), 11,8% des personnes recensées déclaraient consommer des produits avec autant de THC que de CBD, alors que 60,6% déclaraient consommer uniquement un composé psychoactif (THC ou CBD) ou l’un en plus grande quantité (1). Un coup d’œil rapide sur le site internet de la société d’État nous permet de constater plus de 450 variétés de produits balancés disponibles sur le marché, plusieurs d’entre elles pouvant être consommées sous forme vaporisée (2).

Bien que les Enquêtes québécoises sur le cannabis montrent des tendances à la hausse de la consommation de produits de cannabis balancés sous forme vaporisée (3), peu d’étude a évalué la modulation des effets psychoactifs du THC en relation à différentes concentrations de CBD sur l’être humain. Pourtant, cette question est fondamentale pour les personnes qui consomment à des fins non-thérapeutiques qui souhaitent faire un choix éclairé et réduire les risques d’effets délétères associés à leurs consommations.

Pour remédier à ce manque de connaissance, le laboratoire de recherche du Dr. Didier Jutras-Aswad a lancé une nouvelle étude innovante portant sur les effets psychoactifs du THC en interaction avec le CBD dans les produits vaporisés. Dès mai 2024, tout adulte en santé âgé entre 21 à 49 ans est invité à s’inscrire au projet de recherche par l’entremise de notre site internet ou par téléphone.

Pour plus d’information, veuillez consulter l’étude « SPECTRE » sous la section « ÉTUDES DISPONIBLES » .

Article rédigé par Anne-Marie Bissonnette

Références

  1. Conus, F. et Dupont, K. (2023). Enquête québécoise sur le cannabis 2022. La consommation de cannabis et les perceptions des Québécois. État des lieux quatre ans après la légalisation, Québec, Institut de la statistique du Québec, p. 38-39.

  2. Société québécoise du Cannabis (2024). Cannabis Hybride—Nos variétés de marijuana Hybride, [En ligne], page consultée le 6 mars 2024 à l’adresse https://www.sqdc.ca/fr-CA/hybride?keywords=*&fn1=CannabisTypeLookupValue&fv1=F03&fn2=InStock&fv2=en+ligne%7Cen+succursale

  3. Conus, F. et Dupont, K. (2023). Enquête québécoise sur le cannabis 2022. La consommation de cannabis et les perceptions des Québécois. État des lieux quatre ans après la légalisation, Québec, Institut de la statistique du Québec, p. 91-98.

 


Catégories

Traitements innovants en toxicomanie

Avril 2024


Jusqu’à 60 % des jeunes ayant une psychose consomment du cannabis, ce qui est associé à des conséquences cliniques et psychosociales moins bonnes. Alors que les interventions existantes sur le cannabis se concentrent généralement sur l’abstinence ou la réduction de la consommation, les interventions efficaces restent rares, souvent limitées par de faibles taux d’engagement. Il existe une demande croissante pour des interventions de réduction des méfaits qui peuvent bénéficier aux personnes ayant une consommation persistante de cannabis, bien qu’il y en ait peu pour cette population. L’intégration des préférences du patient dans la conception de l’intervention pourrait améliorer l’engagement et l’efficacité de l’intervention, bien que cela reste peu étudié pour les interventions sur le cannabis adaptées aux personnes ayant une psychose.

Pour combler cette lacune, notre équipe de recherche a mené une enquête comprenant deux expériences de choix discret auprès de 89 jeunes ayant une psychose et consommant du cannabis à travers le Canada, publiée ce mois-ci dans La Revue Canadienne de Psychiatrie (1). Les résultats de l’étude ont montré une préférence pour les interventions de réduction des méfaits du cannabis qui étaient brèves, basées sur la technologie et qui incluaient des séances de rappel (en particulier des séances plus courtes). L’acceptabilité et la préférence pour d’autres caractéristiques de l’intervention (par exemple, l’approche psychologique utilisée, les objectifs d’intervention préférés, les préférences pour les interventions basées sur la technologie) ont également été évaluées dans cette étude.

Cette étude est l’une des premières à documenter les préférences des patients en relation avec les interventions de réduction des méfaits du cannabis. Ces résultats ont guidé le développement de CHAMPS, une intervention brève de réduction des méfaits du cannabis, basée sur la technologie et adaptée à cette population, récemment développée par notre équipe ; CHAMPS fait actuellement l’objet d’une évaluation dans le cadre d’un essai contrôlé randomisé pilote. Les résultats de cette enquête peuvent également guider la conception de futures interventions de réduction des méfaits pour cette population.

 

Article par Stephanie Coronado-Montoya

 

Références

1 Coronado-Montoya, S., Abdel-Baki, A., Crockford, D., Côté, J., Dubreucq, S., Dyachenko, A., Fischer, B., Lecomte, T., L’Heureux, S., Ouellet-Plamondon, C., Roy, M.-A., Tibbo, P., Villeneuve, M., & Jutras-Aswad, D. Preferences of Young Adults With Psychosis for Cannabis-Focused Harm Reduction Interventions: A Cross-Sectional Study: Préférences des jeunes adultes souffrant de psychose pour les interventions de réduction des méfaits axées sur le cannabis : une étude transversale. 0(0), 07067437241242395. https://doi.org/10.1177/07067437241242395

2 Coronado-Montoya, S., Abdel-Baki, A., Côté, J., Crockford, D., Dubreucq, S., Fischer, B., Lachance-Touchette, P., Lecomte, T., L’Heureux, S., Ouellet-Plamondon, C., Roy, M.-A., Tatar, O., Tibbo, P., Villeneuve, M., Wittevrongel, A., & Jutras-Aswad, D. (2023). Evaluation of a cannabis harm reduction intervention for people with first-episode psychosis: Protocol for a pilot multi-centric randomized trial JMIR Research Protocols, 12, e53094. https://doi.org/10.2196/53094

 


Catégories
Traitements innovants en toxicomanie

Mars 2024

Présentation du projet ASCME*

La consommation de méthamphétamine connait une augmentation considérable à l’échelle mondiale au cours des dernières années (1). Le Canada est confronté à cette croissance problématique à l’instar du monde entier (2).

L’utilisation de méthamphétamine s’accompagne à long terme d’une morbi-mortalité importante incluant des complications psychiatriques, physiques et sociales, ce qui représente un lourd fardeau pour le système de santé (3).

À l’heure actuelle, aucun médicament pharmaceutique n’est approuvé au Canada pour le traitement des troubles liés à l’usage de méthamphétamine, et le traitement recommandé repose principalement sur les thérapies psychosociales telles que les thérapies cognitivo-comportementales et les entretiens motivationnels (4).

La prise en charge des troubles liés à l’usage de stimulants devient donc une priorité au Canada et à travers le monde.

Le projet ASCME est un essai multicentrique, randomisé et contrôlé pancanadien qui vise à déterminer si l’ajout d’une dose élevée de Lisdexamfetamine (Vyvanse®) et d’une thérapie de gestion par contingence axée sur l’engagement de la personne, seule ou en combinaison, avec le traitement clinique standard, peut réduire le nombre de jours de consommation de méthamphétamine chez des personnes qui en consomment de manière problématique consommateurs.

Ce projet s’adresse aux adultes âgés de 18 à 55 ans présentant des troubles modérés à sévères liés à l’usage des méthamphétamines selon le DSM-5, et qui veulent arrêter ou réduire leur consommation de méthamphétamine.

L’essai clinique est en cours au sein du Laboratoire de recherche Didier Jutras-Aswad et le recrutement continue jusqu’en mai 2025.

*ASCME : Ajout d’un stimulant à haute dose et d’une approche par contingence axée sur l’engagement, seul et en combinaison, au traitement standard pour la gestion du trouble lié à l’usage de méthamphétamine

 

Article par Sonia Chila

Références

  1. crime OdNUcldel. ONUDC, Rapport mondial sur les drogues 2022 2022 [cited 10_Mar_2024]. Available from: https://www.unodc.org/res/wdr2022/MS/WDR22_Booklet_1_french.pdf.

  2. substances Ccsldpelud. Méthamphétamine Mars 2020 [cited12_Mar_2024]. Available from: https://www.ccsa.ca/sites/default/files/2020-03/CCSA-Canadian-Drug-Summary-Methamphetamine-2020-fr.pdf.

  3. Djamshidian A. Neurobehavioral Sequelae of Psychostimulant Abuse. Int Rev Neurobiol. 2015;120:161-77.

  4. Gouzoulis-Mayfrank E, Härtel-Petri R, Hamdorf W, Havemann-Reinecke U, Mühlig S, Wodarz N. Methamphetamine-Related Disorders. DtschArztebl Int. 2017;114(26):455-61.

Catégories

Traitements innovants en toxicomanie

Février 2024


Remodeler le traitement des addictions : La pertinence des approches de non-abstinence

Le paradigme de l’abstinence comme seul résultat pertinent dans le traitement des troubles liés à l’utilisation de substances a été ébranlé une fois de plus par les résultats d’une étude publiée en janvier 2024 dans la prestigieuse revue Addiction. Un laboratoire de recherche affilié à l’université américaine Johns Hopkins a analysé une vaste base de données d’essais cliniques rigoureusement menés sur l’efficacité des traitements pharmacologiques dans le traitement de la dépendance à la méthamphétamine ou à la cocaïne chez les personnes âgées de 18 ans ou plus. L’équipe de scientifiques a constaté que, outre l’abstinence, la réduction de la fréquence de consommation était associée à des avantages significatifs, notamment la réduction des symptômes dépressifs, de l’état de manque, des problèmes juridiques liés à la consommation de drogue, des comportements de recherche de drogue, ainsi qu’une amélioration globale significative.

Au cours des dernières décennies, la recherche dans le domaine des traitements de la toxicomanie a montré que les gens sont motivés par des actions et des objectifs spécifiques et que l’abstinence n’en fait tout simplement pas partie. On estime qu’environ 25 % des personnes qui recherchent un traitement contre les troubles d’usage de substances ne sont pas motivées pour participer à des traitements axés uniquement sur l’abstinence. Au lieu de les étiqueter comme non motivés ou même incapables de contrôler leur consommation de substances, les approches thérapeutiques devraient être flexibles et tenir compte des expériences de vie individuelles et des priorités du traitement, qui comprennent souvent la réduction de la consommation de substances, l’amélioration de la santé mentale, de la qualité de vie et de l’auto-efficacité.

Cet article « fraîchement sorti de presse » plaide en faveur d’une transition vers des modèles qui intègrent des choix d’objectifs dans le traitement de la toxicomanie. Surtout, il encourage la recherche sur les modalités de traitement qui intègrent des résultats autres que l’abstinence. Enfin, il souligne que les progrès dans les traitements de la toxicomanie sont alimentés par une relation dynamique entre la recherche et les besoins et préférences des individus en matière de traitement.

 

Article par Ovidiu Tatar


Catégories

Traitements innovants en toxicomanie

Nouvelle publication: Trois particularités remarquables liées à la crise des décès par opioïdes au Canada et leurs implications pour les interventions de santé publique


Une nouvelle publication de Benedikt Fischer, Tessa Robinson et Didier Jutras-Aswad révèle trois particularités liées à la crise des opioïdes au Canada et leurs implications pour les interventions en santé publique. Entre autres:

  1. Opioïdes différents selon les régions : Dans l’ouest du Canada, la majorité des décès liés aux opioïdes sont causés par du fentanyl illégal, tandis que dans l’est du pays, ils sont principalement dus aux opioïdes sur ordonnance.

  2. Lieux des overdoses: La plupart des overdoses surviennent à domicile ou dans des refuges, ce qui complique l’intervention et l’aide rapides des services d’urgence.

  3. Évolution des méthodes de consommation de substances : Les gens inhalent de plus en plus de drogues, ce qui entraîne une augmentation des overdoses.

Cette étude souligne ces trois facteurs clés et leurs implications associées pour le développement de programmes d’intervention efficaces afin d’améliorer notre réponse à la crise des décès par surdose de drogues.

Pour lire l’étude : https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/dar.13796

Article par Jane Ramil