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Mars 2022

HiTOP, un modèle alternatif efficace de psychopathologie ?

Compte tenu de l’ubiquité et de l’omniprésence du Manuel Diagnostique et Statistique des troubles Mentaux (DSM) (1) dans la pratique et la recherche psychiatriques nord-américaines, il peut être surprenant de constater que la validité d’un grand nombre, voire la plupart, des diagnostics décrits soit constamment remise en question. En fait, jusqu’à 40 % des diagnostics n’atteignent pas une fiabilité justifiable lors des essais sur le terrain du DSM-5(2)(3). Sans compter que de nombreux cliniciens ne s’y réfèrent pas dans la pratique (4). En outre, la nature catégorique du DSM (en l’occurrence, présence ou absence de diagnostic) s’avère problématique.

Bien qu’il soit important d’un point de vue clinique que de nombreux patients sachent s’ils souffrent ou non d’un trouble psychiatrique, il n’existe aucune preuve de l’existence de troubles mentaux en tant qu’entités catégoriques discrètes ; en fait, la plupart des données scientifiques indiquent une nature dimensionnelle ou continue de la psychopathologie (5).

En réponse, Roman Kotov et ses collègues ont proposé la Taxonomie Hiérarchique de la Psychopathologie (« Hierarchical Taxonomy of Psychopathology », ou HiTOP)(5). Ce modèle alternatif de psychopathologie conceptualise les troubles mentaux comme étant dimensionnels et organisés de manière hiérarchique. La nouvelle approche proposée repose sur des bases empiriques et elle est guidée par la modélisation statistique plutôt que par l’impression clinique. Elle suggère ainsi que les troubles mentaux puissent être décrits à différents niveaux, en commençant par un facteur transdiagnostique de psychopathologie (facteur « p » (6)), jusqu’aux signes, symptômes et traits de personnalité individuels. HiTOP est de surcroît considéré comme un modèle vivant, qui est continuellement mis à jour avec les preuves scientifiques les plus récentes(5)(7). Grâce à l’utilisation de diverses méthodes d’analyse factorielle, le modèle HiTOP regroupe les unités individuelles de signes et de symptômes en composantes ou traits homogènes, qui sont ensuite regroupés en syndromes « empiriquement dérivés »(6)(8).

Bien qu’il soit encore tout à fait nouveau et changeant, le modèle HiTOP peut constituer une alternative révolutionnaire pour les cliniciens et les chercheurs, avec la possibilité d’être un facteur complémentaire aux manuels cliniques tels que le DSM-5 et la CIM. Le concept ouvre ainsi la porte à des moyens innovants de conceptualiser et de tester des hypothèses sur la maladie mentale.

Références :

1.         American Psychiatric Association. Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (DSM-5®). American Psychiatric Pub; 2013. 1520 p.

2.         Chmielewski M, Clark LA, Bagby RM, Watson D. Method Matters: Understanding Diagnostic Reliability in DSM-IV and DSM-5. J Abnorm Psychol. 2015 Aug;124(3):764–9.

3.         Regier DA, Narrow WE, Clarke DE, Kraemer HC, Kuramoto SJ, Kuhl EA, et al. DSM-5 Field Trials in the United States and Canada, Part II: Test-Retest Reliability of Selected Categorical Diagnoses. AJP. 2013 Jan 1;170(1):59–70.

4.         Ruggero CJ, Kotov R, Hopwood CJ, First M, Clark LA, Skodol AE, et al. Integrating the Hierarchical Taxonomy of Psychopathology (HiTOP) into Clinical Practice. J Consult Clin Psychol. 2019 Dec;87(12):1069–84.

5.         Kotov R, Krueger RF, Watson D, Achenbach TM, Althoff RR, Bagby RM, et al. The Hierarchical Taxonomy of Psychopathology (HiTOP): A dimensional alternative to traditional nosologies. J Abnorm Psychol. 2017 May;126(4):454–77.

6.         Caspi A, Houts RM, Belsky DW, Goldman-Mellor SJ, Harrington H, Israel S, et al. The p Factor: One General Psychopathology Factor in the Structure of Psychiatric Disorders? Clin Psychol Sci. 2014 Mar;2(2):119–37. 7.         Kotov R, Krueger RF, Watson D, Cicero DC, Conway CC, DeYoung CG, et al. The Hierarchical Taxonomy of Psychopathology (HiTOP): A Quantitative Nosology Based on Consensus of Evidence. Annual Review of Clinical Psychology. 2021;17(1):null.

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Février 2022

Le domaine des applications mobiles en santé est en croissance rapide, car un nombre grandissant d’utilisateurs recherchent des interventions facilement accessibles et efficaces pour leurs problèmes de santé. La consommation de cannabis est plus élevée chez les jeunes adultes qui peuvent développer un trouble d’usage du cannabis (TUC), une condition qui a une incidence négative sur leur bien-être mental et leur fonctionnement social.

Dr Jutras-Aswad et son équipe au CRCHUM dirigent un projet de recherche novateur visant à utiliser des interventions psychologiques fondées sur la technologie mobile pour lutter contre les problèmes associés au cannabis chez les jeunes adultes atteints de psychose. En utilisant une approche collaborative incluant des chercheurs nationaux et internationaux, des cliniciens et des patients partenaires, notre équipe a identifié une suite d’interventions psychologiques optimales pouvant être incluses dans une application mobile.

En partenariat avec Akufen, une entreprise montréalaise de conception de médias, la première version de l’application « iCanChange » (iCC) a été élaborée en français et en anglais. Sur la base des commentaires reçus de jeunes adultes traités pour psychose et TUC, nous avons adapté le langage, la conception et la fonctionnalité de l’application. Après un processus de développement de deux ans qui comprenait la résolution de défis imprévus causés par la pandémie de COVID-19, nous sommes heureux d’annoncer que l’application est prête à être utilisée dans le cadre d’un essai clinique. Le recrutement des participants commencera au cours des prochaines semaines à la clinique des jeunes adultes souffrant de psychose (JAP) du CHUM et au sein d’autres cliniques du Québec et des autres provinces. Sur une période de 24 semaines, nous évaluerons l’acceptabilité et la satisfaction des participants à l’égard de l’utilisation de iCC et de ses effets sur la consommation de cannabis en lien avec les psychoses. Nous nous réjouissons à l’idée de pouvoir s’appuyer sur les résultats qui seront générés pour peaufiner davantage iCC afin d’en accroître l’utilité et de nous préparer aux prochaines étapes visant à rendre l’application accessible à un plus grand nombre de jeunes adultes atteints de psychose et TUC.